Source:
Maria-Theresia und Marie-Antoinette, Ihr Briefwechsel während der Jahre 1770-1780, published by Alfred Ritter von Arneth, 1865
Above: Maria Theresa, Holy Roman Empress, artist unknown.
Above: Marie Antoinette, painted by Joseph Ducreux.
My 900th post on this blog!
The letter:
Schönbrunn, le 8 mai 1771.
J'ai reçu vos deux lettres, l'une par le courrier du 16 et l'autre par l'abbé de Vanwolden. J'écris actuellement devant la masse, qui me répresente ma très-chère fille, mais je ne lui trouve pas cet air de jeunesse, qu'elle avait il y a onze mois, et malheureusement le changement d'état n'en est pas la cause; j'attends cette nouvelle avec grand empressement, et me flatte, que le mariage, qui doit se faire en peu de jours, accélérera mes voeux; mais je ne saurais assez vous répéter: point d'humeur là-dessus; la douceur, la patience sont les uniques moyens, dont vous devez vous servir. Il n'y a rien de perdu, vous êtes tous deux si jeunes; au contraire pour vos santés ce n'est que mieux, vous vous fortifiez encore tous deux, mais il est naturel à nous autres vieux parents de souhaiter l'accomplissement, ne pouvant plus nous flatter de voir de petits et arrière-petits-fils.
Vous me ferez grand plaisir, ma chère fille, de me marquer, comme vous trouvez votre belle-soeur; selon le compte que m'en a fait Rosenberg, vous n'aurez pas sujet d'en être jalouse, mais bien d'en avoir pitié et de vous en occuper: cela vous fera honneur et sera à sa place, non pour la gouverner, cela conviendrait aussi peu que la jalousie, mais pour la tirer d'embarras, car on dit qu'elle n'est pas bien de figure, très-timide, point de monde, mais au reste très-bien élevée, avec le temps cela pourra faire une convenable liaison et amitié. Gardez-vous des rapports et contes pour et contre elle: le monde est méchant, on tâchera de gagner en flattant votre amour propre et en le piquant. Conservez soigneusement et tâchez de gagner tous les jours de plus la confiance, que vous me dites, que le Dauphin vous marque, et par votre respect et attachement tâchez de rencontrer en tout l'approbation du roi. Je voudrais bien que vous le vissiez plus souvent chez vous; c'est un point essentiel. Il a vu tous les jours votre belle mère chez elle, et à mon grand étonnement je dois apprendre qu'il ne vient jamais chez vous que les jours de cérémonie: il est de coutume, cela décide pour ou contre vous dans le public; tâchez donc de gagner à l'avenir ce point; j'en touche quelque chose à Mercy: ce qui est de la plus grande conséquence.
Ce que vous me dites des deux dames, qu'on a données à la comtesse de Provence, doit vous convaincre, combien vous devez user de précaution; quelle différence de Mme de Noailles à ces deux! Je veux vous passer qu'elle vous excède à force de vous vouloir du bien, mais c'est toujours une femme qui passe pour être honnête et attachée à vous; c'est un grand point, et étant des premières maisons, où trouverez-vous des parfaites sans intrigues ou sans être ennuyantes? Je suis bien aise, après ce que vous m'en dites de St. Mégrin, d'en être quitte; mais il serait temps de nous envoyer une fois un ambassadeur, de même de nommer un ministre, car il est bien difficile de s'expliquer sans en avoir, et si ce n'était pas pour vous, ma chère fille, Mercy aurait pu être mieux employé partout ailleurs que de rester ainsi en inaction; mais vous y perdriez trop et j'ose dire tout: mais tâchez qu'on nous en envoie bientôt, autrement je ne réponds de rien.
Ma chère fille! on dit dans le monde, et on est même étonné que vous voyez si rarement cet ambassadeur, que vous ne lui parlez qu'en passant, et que même vous avez l'air plus embarassé que confiant avec lui. On cite même les exemples de la reine, votre grand'mère, et de votre belle-mère, qui voyaient régulièrement chez elles deux fois la semaine les ministres de leurs familles, qui conversaient avec eux et les distinguaient partout. Si on vous parle autrement et vous conseille de n'en rien faire, je crains que ce n'est pas pour votre bien. Outre cela Mercy est estimé par tout le monde, raisonnable, et ne saurait que vous faire honneur et du bien, en l'écoutant plus souvent. Je vous avoue, que ce que vous m'avez marqué de Paar et de Starhemberg, que ces Messieurs n'avaient pas de bonne réputation, m'a fait de la peine. J'ai vu par là tout ce qu'on ose vous dire, et si vous aviez marqué plus de prédilection pour votre nation, et que vous auriez au moins marqué, que vous ne voulez pas qu'on en parle en mal devant vous, on s'en serait bien gardé. C'est une conviction de plus, qu'on avait raison d'être étonné du peu d'empressement et de protection que vous avez pour les Allemands. Croyez-moi: le Français vous estimera plus et fera plus de compte sur vous, s'il vous trouve la solidité et franchise allemande. Ne soyez pas honteuse d'être Allemande jusqu'aux gaucheries: il faut les excuser par bonté et ne souffrir qu'on ose s'en moquer; peu-à-peu vous vous accoutumerez à en faire de même. Quand on est jeune et voit journellement de ces sortes de choses, il est trop difficile de n'y pas tomber; pour cela il est nécessaire d'avoir une dame ou un ministre, qui puisse vous en avertir à temps. Faites un accueil distingué aux premiers, et des bontés à tous les Allemands, surtout ceux de mes sujets et des premières maisons: aux moindres, c'est-à-dire, qui n'ont point d'entrée à la cour chez nous, de bonté, d'affection et de protection, vous n'en serez jamais blâmée, mais bien plus estimée, hors de ceux qui n'ont jamais eu le bonheur de notre état. Vous l'avez si parfaitement acquis; ne le perdez pas, en négligeant ce qui vous l'a procuré: ce n'est ni votre beauté, qui effectivement ne l'est pas telle, ni vos talents ni savoir (vous savez bien que tout cela n'existe pas), c'est votre bonté de coeur, cette franchise, ces attentions, appliquées avec tant de jugement. On dit vous négligez à parler et distinguer les grands, qu'à la table, au jeu vous ne vous entretenez qu'avec vos jeunes dames, en leur parlant à l'oreille, en riant avec elles. Je ne suis pas si injuste de vouloir vous interdire la conversation très-naturelle des jeunes gens, que vous connaissez, à ceux que vous ne voyez qu'en grand public, mais c'est un point essentiel la distinction des gens, que vous ne devez pas négliger, l'ayant si bien acquis au commencement. Là-dessus aucune négligence et n'imitez personne: suivez ce que vous avez vu et appris ici.
On parle encore des jeux, que vous avez tenus le dernier hiver. Ne vous laissez pas aller au goût de mettre en ridicule les autres; vous y avez incliné un peu, si on s'aperçoit de ce faible, on ne vous servira que trop et vous perdrez cette estime et confiance du public, si nécessaire, si agréable et que vous possédez encore si parfaitement. Ma tendresse ne finirait jamais et pardonnez-moi ces répétitions, mais je les regarde comme la base de votre bonheur, jugez combien il m'est à coeur. Ne croyez pas que Mercy m'en a écrit, mais je dois vous répéter qu'il est étonnant ce qu'on sait ici; je n'en ai aucune des correspondances, mais il y en a une quantité ici et qui marquent des particularités étonnantes. Tout le monde sachant ma tendresse pour vous, me les porte pour ma consolation, mais voyant depuis quelque temps de diminution, qu'on attribue encore aux conseils qu'on vous donne, j'ai cru ne pouvoir faire de trop sur ce point, et même en charger Mercy, de m'informer et de vous assister plus que jamais de ses conseils.
Les confusions, qui sont actuellement chez vous, ne font bien de la peine pour le roi et pour vous. Mercy m'assure que vous vous conduisez à vous attirer l'estime de tout le monde, et augmenter même par une conduite mésurée, bonne et chrétienne l'estime qu'on a de vous. Suivez donc les conseils de Mercy, qui n'est occupé que de vous, et ne vous mêlez d'aucun parti; si vous pouvez même ignorer tout, ce ne serait que mieux. C'est dans ce moment, que je préfère les promenades à cheval, en calèche, les bals, spectacles et tout ce qui est plaisir, fussent même des enfantillages; pour couper court aux occasions, qu'on n'en parle. Vous serez étonnée que nous sommes seuls dehors sans l'empereur. Vous connaissez son affection pour la ville, j'ai cru devoir lui proposer d'y rester, ce qu'il a accepté avec plaisir, venant tous les jours dîner avec nous ici.
English translation (my own):
Schönbrunn, May 8, 1771.
I have received your two letters, one by the mail of the 16th and the other by Father Vanwolden. I am currently writing to the masses who represent my dear daughter to me, but I do not find in her that youthful air which she had eleven months ago, and unfortunately the change of state is not the cause; I await this news with great eagerness, and flatter myself that the marriage, which must take place in a few days, will accelerate my wishes; but I cannot repeat enough: no temper on this; gentleness, patience are the only means which you must use. There is nothing lost, you are both so young; on the contrary, for your health, it is all the better, you are still growing stronger, but it is natural for us old parents to wish fulfillment, no longer being able to flatter us to see grandsons and great-grandsons.
You will give me great pleasure, my dear daughter, to mark me, as you find your sister-in-law; according to the account that Rosenberg has given me, you will not have reason to be jealous of her, but to have pity on her and to take care of her: she will do you honour and will be in her place, not to govern her, that would suit as little as jealousy, but to help her out, for it is said that she is not well in face, very shy, not crowded, but, moreover, very well brought up; with time this can make a suitable bond and friendship. Beware of reports and tales for and against her: the world is wicked, one will try to win by flattering your self-esteem and by pricking it. Conserve carefully and try to earn more every day the trust which you tell me that the Dauphin marks you, and with your respect and dedication, try to meet in all the approval of the King. I would like you to see him more often at home; this is an essential point. He has seen your mother-in-law at her house every day, and to my great astonishment I must learn that he never comes to your house except on ceremonial days: it is customary, it decides for or against you in the public; try therefore to gain this point in the future; I touched something on Mercy, which is of the greatest consequence.
What you tell me about the two ladies who have been given to the Countess of Provence must convince you of how careful you must be; what a difference Madame de Noailles has to these two! I want to spare you that she is exceeding you by dint of wanting you well, but she is always a woman who passes for being honest and attached to you; that is a big point, and being early houses, where will you find perfect ones without intrigue or being boring? I am very glad, after what you tell me about St. Mégrin, to be done with it; but it would be time to send us an ambassador once, as well as to appoint a minister, for it is very difficult to explain without having one; and if it were not for you, my dear daughter, Mercy could have been better employed everywhere else than to remain thus in inaction; but you would lose too much and, I dare say, everything; but try to be sent to us soon, otherwise I will not answer for anything.
My dear daughter! people say in the world, and people are even astonished that you see this ambassador so rarely, that you only speak to him in passing, and that you even seem more embarrassed than confident with him. They even cite the examples of the Queen, your grandmother, and your mother-in-law, who regularly saw their family ministers twice a week, who conversed with them and distinguished them everywhere. If someone talks to you otherwise and advises you not to do it, I'm afraid it is not for your good. Besides that, Mercy is esteemed by everyone, reasonable, and can only do you honour and good by listening to her more often. I confess to you that what you impressed on me about von Paar and von Starhemberg, that these gentlemen did not have a good reputation, hurt me. I have seen by that all that one dares to say to you, and if you had marked more predilection for your nation, and *that* you would have at least marked, that you do not wish that one speak badly about it in front of you, one would have been careful not to. It is one more conviction that we were right to be surprised at the lack of eagerness and protection you have for the Germans. Believe me: the French will esteem you more and will count on you more if they find in you German solidity and frankness. Do not be ashamed of being German to the point of awkwardness: you must excuse them out of kindness and not allow anyone to dare to laugh at them; little by little you will get used to doing the same. When you are young and see these kinds of things every day, it is too difficult not to fall for them; for this it is necessary to have a lady or a minister who can warn you in time. Give a distinguished welcome to the first ones, and kindness to all the Germans, especially those of my subjects and the first houses: at the least, that is to say, who have no entry into the court with us, of kindness, affection and protection, you will never be blamed, but much more esteemed, out of those who have never had the happiness of our state. You have acquired it so perfectly; do not lose it by neglecting what gave it to you: it is neither your beauty, which indeed is not such, nor your talents nor knowledge (you know very well that all this does not exist), it is your kindness of heart, this frankness, these attentions, applied with so much judgment. It is said that you neglect to speak and distinguish the greats, that at table, at the game, you only talk to your young ladies, whispering in their ears, laughing with them. I am not so unjust in wanting to forbid you the very natural conversation of young people whom you know, to those whom you only see in general public, but it is an essential point the distinction of people that you must not be neglected, having acquired it so well in the beginning. Thereupon, no neglect; and do not imitate anyone: follow what you have seen and learned here.
One still speaks about the games you held last winter. Do not indulge yourself in making fun of others; you have inclined to it a little, if one notices this weakness, one will serve you only too much and you will lose this esteem and confidence of the public, so necessary, so pleasant and which you still possess so perfectly. My tenderness would never end, and forgive me these repetitions, but I regard them as the basis of your happiness, judge how much it is to my heart. Do not think that Mercy wrote to me, but I must repeat to you that it is astonishing what one knows here; I do not have any of the correspondences, but there is a quantity here and which mark surprising peculiarities. Everyone, knowing my affection for you, brings them to me for my consolation, but seeing for some time a decrease, which is still attributed to the advice given to you, I thought I could not do too much on this point, and even instruct Mercy to inform me and assist you more than ever with his advice.
The confusions which are with you at the present time do not cause much pain for the King and for you. Mercy assures me that you are conducting yourself to gain the esteem of everyone, and to increase even by measured, good and Christian conduct the esteem that one has of you. So follow the advice of Mercy, who is concerned only with you, and do not interfere with any party; if you can even ignore everything, that would be all the better. It is at this moment that I prefer horseback riding, carriage rides, balls, spectacles and all that is fun, even childishness; to cut short opportunities, let it be spoken of. You will be surprised that we are alone outside without the Emperor. You know his affection for the city, I thought I should suggest that he stay there, which he accepted with pleasure, coming to dine with us here every day.